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Le système électrique en Belgique est en cours de transition vers un système décarboné et décentralisé. Cette transition doit s’accélérer dans les prochaines années, afin de permettre le phasing out de la production nucléaire d’ici 2025, tel que prévu par la loi et d’être en phase avec le cadre européen du ‘Clean Energy Package’, à l’horizon 2030.
Cette année 2019 aura vu quatre moments importants se succéder sur la thématique de la sécurité d’approvisionnement électrique en Belgique :
- Janvier 2019 : la mise en service de la nouvelle interconnexion (NEMO) en courant continu reliant la Belgique à la Grande Bretagne. D’une capacité de 1 GW, cette nouvelle infrastructure vient renforcer la capacité d’interconnexion totale de la Belgique avec les pays limitrophes, qui s’élèvera à court terme à 7,5 GW de capacité totale d’importation potentielle.
- Avril 2019 : une loi a été votée, qui introduit un mécanisme de rémunération pour la capacité électrique (dit ‘CRM’). Ce mécanisme, couvrant l’ensemble des capacités présentes sur le marché, devrait remplacer à terme la réserve stratégique (mécanisme hors marché) et assurer la sécurité d’approvisionnement dans un contexte post-nucléaire.
- 5 juin 2019 : la publication du nouveau Règlement européen sur l’organisation du marché de l’électricité. Applicable au 1er janvier 2020, ce Règlement s’impose aux Etats membres de l’Union européenne et prévoit notamment une série de nouvelles règles en matière de sécurité d’approvisionnement et d’encadrement des mécanismes de soutien à la capacité.
- Fin juin 2019 : Elia publie son étude sur l’adéquation du système électrique belge à l’horizon 2030. Elle identifie un besoin de 3,9 GW de nouvelles capacités nécessaires en 2025 (ce besoin diminuant par la suite) pour compenser la sortie du nucléaire tout en respectant les critères actuels de sécurité d’approvisionnement. La CREG a remis dans la foulée une analyse critique de l’étude d’Elia tant sur l’estimation des besoins en nouvelles capacités que sur le rôle du CRM en tant qu’instrument privilégié pour parvenir à assurer la sécurité d’approvisionnement au meilleur coût.
EDORA, en tant que fédération d’entreprises d’énergie renouvelable œuvrant pour la transition énergétique, souhaite s’exprimer sur cette thématique afin de s’assurer que l’efficacité énergétique, le renouvelable et la flexibilité restent au centre des solutions qui sont mises sur la table pour le futur de notre système électrique.
L’orientation générale proposée par EDORA pour évaluer les solutions proposées est la suivante :
- La sécurité d’approvisionnement constitue une contrainte à optimiser pour le système électrique, tandis que les objectifs généraux restent la décarbonation complète et la durabilité de notre système énergétique tout en garantissant l’accès à l’énergie pour tous.
- Le mécanisme CRM, ou plus généralement tout mécanisme de maintien de la sécurité d’approvisionnement, doit s’intégrer dans ce cadre, ce qui implique :
-Accompagner la transition énergétique, en particulier soutenir le développement accéléré des énergies renouvelables dans un système énergétique de plus en plus décentralisé, décarboné, durable et flexible (avec un déploiement nécessaire des solutions en matière de gestion de la demande (DSM) et de stockage).
–Minimiser le coût sociétal du mécanisme, qui peut être apparenté à une prime d’assurance pour garantir la fiabilité du système électrique, de manière à ce qu’il s’avère le moins coûteux possible pour les consommateurs belges, afin que les moyens puissent se concentrer sur une transition énergétique accélérée.
Dans le contexte actuel, EDORA propose que les autorités belges prennent une position claire sur les points suivants :
- Confirmer l’échéancier de sortie de la production d’électricité d’origine nucléaire. Cette confirmation est essentielle pour clarifier les besoins en nouvelles capacités à l’horizon 2025 et au-delà (sachant que l’étude d’adéquation d’Elia identifie un besoin en nouvelles capacités diminuant après 2025). Seul un Gouvernement de plein exercice peut confirmer un tel échéancier et, sur cette base, définir les contours du futur mécanisme de soutien à la capacité.
- Demander à Elia et à la CREG, en concertation avec le SPF énergie et le Bureau fédéral du Plan, de clarifier les hypothèses fortement divergentes à ce stade, tant sur l’estimation des besoins en nouvelles capacités que sur le maintien (ou non) de l’option de la réserve stratégique par rapport à l’option CRM.
- Préciser dans quelle mesure la loi CRM et le design tel que proposé par Elia et la CREG sont conformes au nouveau cadre législatif européen en matière de sécurité d’approvisionnement et de mécanismes de soutien à la capacité. Les aspects suivants devront notamment être abordés (cf. articles 18, 18a, 19 et 19a du Règlement du 5 juin 2019) :– Mener l’évaluation de l’adéquation du système électrique avec les pays limitrophes (‘regional scope’), en se basant sur une évaluation d’adéquation de la capacité au niveau européen menée par ENTSO-e. Cette dernière devant identifier les problèmes d’adéquation au niveau des Etats membres et des zones de réglage, de manière à mieux mutualiser les ressources disponibles pour soutenir la capacité.
– Démontrer que toutes les mesures ont été prises ou seront prises (via un ‘implementation plan’) pour améliorer le fonctionnement des marchés de l’énergie (EOM), en prévoyant notamment la suppression des plafonds de prix et l’encouragement de l’auto-production, du stockage énergétique, de l’efficacité énergétique et du DSM.
-En dernier recours, si des problèmes de sécurité d’approvisionnement restent identifiés considérant l’ampleur de la capacité nucléaire retirée du marché, introduire un mécanisme de soutien à la capacité, sous la forme d’une réserve stratégique en première option, ou d’un autre type de soutien en seconde option. Tout en respectant une série de principes importants, notamment le caractère temporaire et proportionné du mécanisme (qui ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour résoudre le problème d’adéquation identifié).
- Démontrer que le mécanisme retenu et ses modalités d’application constituera bien la meilleure option pour assurer la sécurité d’approvisionnement électrique tout en soutenant les objectifs de transition accélérée vers un système électrique 100% renouvelable
EDORA estime que les précisions apportées sur les points sus-mentionnés sont essentielles afin d’assurer, dans les 20 prochaines années, un cadre favorable pour l’évolution d’un système électrique belge durable et conforme aux cadres légaux et aux engagements pris par la Belgique dans les cadres européen et international, avec un rapport coût efficacité optimal pour la société belge.